Daniel Fernandez inaugure ici un rendez-vous régulier pour partager ses coups de cœur à travers le portrait de femmes artistes, toutes singulières et exceptionnelles. Voici Nathalie Franceschi, des pistes de danse au bleu des océans.
Qu’elle soit devant la caméra ou bien derrière (comme en Afrique, en tant qu’assistante-réalisatrice), ou encore en train de tourner une pub, ou de « faire l’actrice » (rôle principal dans « Carma », récemment primé « Best Crime Film au Los Angeles Film Awards »), entre deux avions, deux trains ou deux castings, répétitions et spectacles, ou bien entre deux tournages, cette sirène aux cheveux longs chevauche les vagues du bout du monde à bord du voilier La Boudeuse. Et c’est là que son doctorat de biologie à la main lui sert de passeport, comme lors de ses expéditions aux mille coins de la planète.
Sirène des océans
Ne dit-on pas des femmes qu’elles savent faire deux choses à la fois ? Hé bien ! Le parcours de Nathalie déborde (et de loin !) cette règle-là. À bord du bateau, une éprouvette à la main, l’œil dans un microscope, un scénario s’installe dans sa mémoire, dans lequel viennent s’entrelacer pas et passes chorégraphiques du prochain spectacle de flamenco ou répliques à retenir pour un tournage à venir. Au retour d’Indonésie, du Pacifique ou d’un autre bout du monde, Nathalie travaille ses gammes du bout des lèvres ou sur la pointe des pieds quand l’équipage se repose, ou à coups de talon, le dos cambré, la poitrine au ciel, le bras levé, la main dévissant la lune sur le pont de ce voilier. Elle met les voiles sur les pages blanches de son cahier, et la nuit, elle jette son encre sur ce grain de papier.Je l’imagine, cheveux au vent au milieu des océans, répétant et jouant son texte aux embruns, intime public ô combien privilégié. Je me souviens quand elle dansait avec « Caravana », nous étions dix-sept sur scène et une vingtaine sur la route. Nous avons joué au Maroc, en France, en Allemagne…
Et souvent, à la fin du concert, je voyais arriver quelques casanova, d’occase ou en pièces détachées, quelquefois avinés ou illuminés, venus voir si le cœur ou le corps de la jolie gazelle aux cheveux longs serait libre et disponible pour un tango langoureux… Ils passaient très souvent par moi. Et là, les flatteurs tâtaient le terrain, ici et là, vices et verres ça, me faisant beaucoup rire. Une dose de politesse maladroite plus tard, je la voyais étaler ces étalons (prétentieux prétendants) d’une phrase ou deux, les laissant souvent sur le carreau, sans caresse, sans voix et sans voie de secours… Sous sa natte, Nathalie allie charme, classe, humour, mais aussi une répartie d’amazone. Et les plus téméraires d’entre eux s’en souviennent certainement. Fallait-il le mériter pour s’en sortir sans être irrité, pour hériter de l’idée d’un baiser de la belle danseuse de flamenco ! Ce fut une belle période, pour elle et pour nous tous.
Je l’ai toujours connue très professionnelle, en tant que danseuse. Et puis, tout dernièrement, nous avons tourné ensemble le clip Negro y blanco, ainsi qu’un court-métrage intitulé Doggy Bag. J’ai eu la chance de la voir évoluer ces dernières années. Elle a un regard de plus en plus aiguisé et une technique de plus en plus précise. Et, connaissant la Belle et l’observant depuis quinze ans, ça ne m’étonne même plus ! Nathalie est très exigeante avec elle-même, pouvant aller jusqu’à être très dure à son encontre. Elle travaille énormément, suit des cours, n’aime rien tant qu’apprendre, dévore, propose… Bref, quand je regarde son agenda, j’hallucine : il faudrait pouvoir rallonger chaque jour d’une dizaine d’heures, pour contenter cette courageuse globe-trotteuse.
D’ailleurs, je ne sais toujours pas comment elle fait pour se diviser et se multiplier à la fois, entre ses différentes vies de famille, d’amie, de danseuse, de comédienne, d’actrice, de scientifique, d’aventurière sur scène, sur mer et sur terre, j’en passe et des meilleures… Je tire mon sombrero et m’incline devant cette femme qui a su tenir les rênes de sa vie, entre passions et rêves d’enfance. Rien ni personne ne saura la freiner, la dérouter et, encore moins, l’arrêter. Nathalie s’est lancée depuis longtemps sur la voie de ses choix et de ses songes. Voilà, c’était un peu de Nathalie, une pincée d’elle… À mon amie.
Par Daniel Fernandez, chroniqueur culture pour Femmes en Bourgogne.
Voir son clip Negro y blanco ici
Son album YUMA est disponible sur ITunes et Amazon.